VITI OBS, un observatoire piloté des pratiques de viticulteurs engagés dans la réduction de l’usage de produits phytosanitaires.
Pour mener à bien ce projet, VINOVALIE s’est associé à l’INRAE et l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV) sur un programme d’une durée de 4 ans, avec le soutien de la Région Occitanie.
Mickaël Perez est au cœur du projet VITI OBS, il réalise une thèse sur le sujet.
Bonjour, Mickaël. Présente-nous un peu ce projet.
« Le projet VITI OBS se décompose en deux parties.
La première concerne l’élaboration d’un modèle de prédiction des dégâts de la vigne liés aux maladies, en amont de la campagne de production. Ce modèle permettra à terme d’aider les techniciens des caves de VINOVALIE à orienter les viticulteurs coopérateurs dans leur prise de risque et dans l’affectation de leurs parcelles.
La seconde partie consiste à mettre en place un observatoire piloté pour tester des programmes de traitement de la vigne moins dépendants des produits phytosanitaires. Quatre cahiers des charges ont été définis avec une trentaine de vignerons qui se sont portés volontaires pour réaliser cet observatoire sur une parcelle de leur exploitation.
L’objectif majeur de ce projet est de vérifier la faisabilité technique et économique de ces programmes de traitement des vignes sur 4 ans. »
Concrètement, comment cela se met en place chez les vignerons ?
« Chaque viticulteur a choisi son cahier des charges et met en place le programme de traitement défini sur la moitié de sa parcelle. Il trace l’ensemble de ses décisions sur un tableau de suivi et réalise son programme de traitement classique sur l’autre moitié de parcelle, servant de témoin pour l’expérimentation. En parallèle, je réalise un suivi sanitaire régulier des parcelles afin de mesurer les dégâts causés par les principales maladies de la vigne (mildiou, oïdium, black rot, botrytis) ; et en septembre, lors des vendanges, je ferai des prélèvements pour mesurer le rendement, réaliser des micro-vinifications avec l’IFV, et tracer les résidus de produits phytosanitaires.
A la fin de la campagne et après avoir analysé toutes les données d’expérimentation, nous ferons un atelier participatif avec les viticulteurs et les experts partenaires du projet pour valider ou modifier les cahiers des charges expérimentaux. »
Et en quoi consistent ces cahiers des charges ?
« Nous avons défini avec les viticulteurs partenaires et les experts du projet des programmes de traitement permettant d’atteindre différents niveaux de réduction des produits phytosanitaires, dans une logique progressive.
- Le 1er niveau consiste à réduire de moitié l’usage des produits phytosanitaires classiques par rapport à la moyenne régionale.
- Le 2nd niveau vise à garantir le zéro résidu de pesticides dans le vin.
- Le 3ème niveau s’adresse aux viticulteurs en agriculture biologique afin de diviser les doses de cuivre utilisées par 2.
- Le dernier niveau, enfin, vise une utilisation uniquement de produits de biocontrôle.
Ce projet est très ambitieux mais les viticulteurs sont motivés ! »
Quel est le rôle des partenaires du projet ?
« Nous avons fait appel à l’INRAE et l’IFV pour nous accompagner sur ce projet car les enjeux sont très importants et les objectifs sont techniquement élevés.
A l’INRAE, nous travaillons avec deux Unités Mixtes de Recherche (UMR) :
- L’UMR ABSYS basée à Montpellier qui a une grande expertise dans les approches systémiques et la conception d’itinéraires techniques innovants en viticulture.
- L’UMR AGIR basée à Toulouse qui a déjà développé des modèles de prévisions de dégâts similaires à ce que l’on souhaite faire, sur d’autres cultures
L’Institut Français de la Vigne et du Vin, quant à lui, expérimente depuis plusieurs années des programmes de traitements similaires, mais sur des micro-parcelles de leurs domaines expérimentaux.
Ces 3 partenaires vont donc pouvoir nous faire bénéficier de leur expertise et leur expérience afin que nous conduisions au mieux nos expérimentations in situ. Car l’enjeu du projet est de dépasser l’échelle de la station expérimentale et mettre en place un véritable démonstrateur sur l’ensemble du territoire de la coopérative. »
Plus personnellement, qu’est-ce qui te plaît dans ce projet ?
« Après mon stage chez Vinovalie en 2018, on a fait le constat que si on voulait aller plus loin dans la réduction de produits phytosanitaires, il fallait prendre en compte la problématique dans son ensemble et proposer un projet sur le long terme.
Le point de départ, c’est de mettre en place l’expérimentation chez le vigneron : c’est lui-même qui teste un programme de traitement qu’il a coconstruit, dans sa propre vigne. Nous avons réussi à mobiliser une trentaine de vignerons qui sont véritablement acteurs du projet, ce qui témoigne de leur engagement et leur souhait d’être accompagné dans la réduction des produits phytosanitaires.
Mon rôle est de suivre l’expérimentation et non pas de la mener : ce sont les vignerons qui le font. Si l’essai est concluant sur la partie expérimentale, le transfert sur la totalité de son exploitation pourra être envisagée.
Ce qui m’intéresse dans ce projet c’est la relation directe avec le vigneron, suivre l’expérimentation avec eux et voir les différentes problématiques de chacun.
L’entraide, qui est une valeur majeure du modèle de la cave coopérative, ressort à travers ce projet : chaque vigneron procède de différente manière et ils peuvent mutuellement s’entraider pour atteindre l’objectif fixé. »
Et qu’en pensent les viticulteurs ?
Thierry Fournier, viticulteur à Gaillac, nous explique pourquoi il s’est engagé dans le projet VITI OBS.
« En tant que producteur, je me sens aussi concerné par l’utilisation des produits phytosanitaires. Depuis longtemps, j'essaie d'en limiter l'utilisation en diminuant les doses à l'hectare, en ne traitant que lorsque cela parait indispensable, en m'appuyant sur les avis des techniciens, sur la recherche qui évalue en continu la pression parasitaire.
J'essaie aussi de sélectionner des produits plus sélectifs et moins impactant pour l'environnement. Aussi, lorsque VINOVALIE m'a proposé d'essayer de produire des raisins sans résidus de pesticides et ce, avec un appui technique de la cave, tout en conservant l'objectif d’un rendement normal, je me suis porté volontaire et j'espère ainsi continuer à faire évoluer nos pratiques de traitement, pour diminuer au maximum l'utilisation des produits phytosanitaires. »